800 pages complexes et frénétiques
Sur près de huit cents pages complexes, frénétiques, Ellroy réussit l'impensable : ne jamais perdre en route le lecteur. Son style à nul autre pareil fait mouche : rythme infernal, phrases courtes, images chocs, restitution jubilatoire des langages argotiques et racistes de l'époque. Ellroy choque, Ellroy dérange quand il fait œuvre d'historien et se met dans la peau de salauds. On n'imagine pas un romancier français oser la même chose sur la guerre d'Algérie, par exemple. La loi française le permettrait-elle ? On est emporté, bousculé, effrayé par tant de puissance, de noirceur. On ressort essoré de cette lecture-là avec la certitude d'avoir croisé un ovni littéraire concocté par un virtuose du mal et un impitoyable destructeur de la mythologie américaine.
«Underworld USA» de James Ellroy, traduit de l'américain par Jean-Paul Gratias, Rivages/Thriller.
Le Figaro, 14 janvier 2010.