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27 juillet 2005

Parisianisme honteux par Patrick Besson

Tout le monde a le droit de dire du bien de sa ville sauf les Parisiens. Du reste, l'écrivain parisien est aussi mal vu en librairie que l'automobiliste immatriculé 75 sur l'autoroute. Le lecteur - surtout le lecteur parisien ! - lui préfère le prosateur béglais, l'autofictionneur montpelliérin, le poète briançonnais et le chroniqueur niçois. Paris n'est pas une capitale mais une tare. On vit tellement mieux, selon les journaux, à Grenoble, Biarritz, Nancy, où sais-je encore. Nantes, tiens. La fête ? C'est Marseille ! Le mot parisianisme est devenu aussi péjoratif que celui de communisme. Ou de fascisme. Le Parisien, pour une grande partie de l'opinion publique française, est un être fat et méprisant, incapable d'art comme de générosité, qui commet le crime d'élever ses enfants dans la pollution et la délinquance régnant à Paris. Et pourtant, quand je débouche à pied de la rue Aristide-Briand, traverse le boulevard Saint-Germain et m'engage sur le quai Anatole-France, ces insultes et ces calomnies s'envolent de mon coeur. Devant moi, de l'autre côté de la Seine, la place de la Concorde. A droite, le Louvre. Encore plus loin à droite, la Sainte-Chapelle et Notre-Dame. Et là, j'ai cette pensée satanique : putain, que c'est bon de ne pas habiter Toulouse. Ou Brest !

Les éditions Chronique se trouvent au numéro 24 de l'avenue Freycinet, à Trélissac (24750). Ça ne les empêche pas de publier, dans leur collection « Chroniques des métropoles », un Paris signé Jean des Cars. Il faut applaudir ce fair-play. Guy des Cars est devenu richissime en écrivant sur les pauvres et les malades, son fils Jean a dépensé tout l'argent dans les palaces et les trains de nuit, sur lesquels il a fini par faire des livres. Guy et Jean sont ensemble dans le « Quid ». J'aurais bien aimé être dans le « Quid » avec mon père. Ou mes fils. Bientôt, Justine Lévy y sera avec BHL comme Yann Queffélec y est avec Henri et Antoine Audouard avec Yvan.

Je me souviens du pamphlet-confessions de Guy des Cars : « J'ose ». Chez Stock, peut-être ? Jean ose aussi. Il ose faire, chez Chronique, un album sur l'histoire de Paris depuis 4200 avant J.-C. jusqu'au 27 juillet 2003, jour de la victoire du centième tour de France par l'Américain Lance Armstrong, dont la photo termine l'ouvrage, ce qui fera plaisir à l'ambassadeur américain. Comme Alexandre Dumas, mais non Alexandre Dumas fils, il a eu des collaborateurs : Magalie Guilpain, Monique des Cars et Michel Marmin. Impossible, évidemment, de résumer ces 235 grandes pages, toutes illustrées avec soin (iconographie : Thierry Etévé).

Je me suis surtout penché sur le Paris du Moyen Age parce que j'écris un roman sur les croisades : Saint-Sépulcre ! Pas toutes les croisades : la première, la septième et la huitième. Ce sont les mieux. De toute façon, les autres, je n'y comprends rien. J'ai un faible pour Philippe Auguste. Un jour, son médecin lui demande de boire autant d'eau que de vin. Le roi exige qu'on les lui serve séparément. Après avoir bu son gobelet de vin, il prend le gobelet d'eau, puis le repose et dit à son médecin : « Je n'ai plus soif ! » C'est la seule histoire drôle que je connaisse. Le gentil roi, qui avant de quitter Paris pense à lui faire une ceinture de chasteté de remparts, pour que pendant son absence personne ne la lui prenne ! 2,5 kilomètres sur la rive gauche, 2,6 kilomètres sur la rive droite. En 1193, Philippe épouse une Danoise - Ingeburge, soeur du roi Knout - et, après leur nuit de noces, n'a plus jamais voulu la voir, ni lui parler, ni parler d'elle avec quelqu'un. Il n'a jamais dit pourquoi. C'est peut-être ça, l'explication de la gentillesse des femmes scandinaves envers les hommes français : elles veulent se faire pardonner. Mais de quoi ?

© le point 18/03/04 - N°1644 - Page 123 - 634 mots

Commentaires
L
Enfin, et même si ce billet est déjà un peu ancien, il fait du bien à lire.<br /> Je suis parisien. Pardon à tous ceux qui estiment avoir le droit de me le reprocher. La prochaine fois, je ferai comme eux, et je me débrouillerai pour naître dans une autre région, dont je serai fier, car ce sera grace à moi qu'elle sera belle !!<br /> J'en ai assez de me voir renvoyer en permanence mon "parisianisme" supposé à la figure par des gens qui ne comprennent même pas ce que ce mot veut dire. La grande majorité des élites qui vivent à Paris sont d'origine provinciale, et nombre de parisiens vivent en province sans se poser de questions. D'ailleurs, j'entend assez rarement les parisiens reprocher aux provinciaux qui vivent dans la capitale leur "provincialisme". Nous sommes de là où nous avons été élevés. Certains l'assument, d'autres non ; certains croient y être pour quelque chose ... et si je dis qu'il y a des imbéciles partout ? Ah non, c'est une pensée sans doute trop parisienne ...<br /> <br /> Merci à Patrick Besson d'oser tenir de tels propos propre à le vouer à la vindicte poujadiste et passéiste. On a les ennemis que l'on mérite.<br /> <br /> Pour prolonger la discussion, rendez-moi donc visite : parisiendeprovince.over-blog.com
S
Je ne suis pas parisienne, c'est Paris qui m'a adoptée.. Comme dit Enrico Macias (désolée les grosses têtes intello) "Toi Paris tu m'as pris dans tes bras"..<br /> J'ai vécu quelques années dans une très très belle province Française, et puis je suis revenue très vite dans la ville de mes amours..<br /> J'adhère totalement au texte de Besson.. Je vis entre les Invalides et la Tour Eiffel.. Que voulez-vous, quand je fais mon marché et que j'aperçois la pointe qui monte au ciel, je me dis que j'ai beaucoup de chance..<br /> C'est aussi à Paris que j'ai mes plus chers amis.. <br /> <br /> Chacun ses petits bonheurs.. sourire
P
... parce qu'il faudrait "comprendre" quelque chose à Besson ?<br /> Ses textes doivent faire le bonheur des séminaires de tout poil, tant cétautomatix.<br /> La fin de celui-ci est un exemple-type : la pique misogyne mais pas trop lourde (pour le beauf de base) que la lectrice ne peut pas rageusement froisser sans se rendre ridicule parce qu'elle est censée contenir un sous-entendu subtil (cherchez pas : y en a pas).<br /> Et c'est ainsi que Besson reste "grand" (et que Marianne y survit, sacré mérite...)<br /> <br /> Patrice, ingeborgien !
D
Bonsoir à tous les deux, je vous trouve un peu sévère avec avec ce texte de Besson. Ou alors c'est moi qui ne l'ai pas compris !
N
99% des blogs, par exemple, sont des caricatures de parisianisme "snob" (je n'aime pas ce mot mais c'est le plus adéquat). <br /> <br /> "Paris n'est pas une capitale mais une tare" : non, pas Paris, mais ses habitants, pressés de mettre en permanence en avant ce seul fait, celui d'habiter Paris, comme signe "d'une certaine importance".<br /> <br /> Mais peu importe. Car nous, vos provinciaux admiratifs en attente de vos sages décisions, nous contentons par exemple (ce fût mon cas tout le mois de juillet) d'aller à la plage tous les jours, de nous laisser glisser sous l'eau de l'Atlantique - qui fouette et muscle - et de dîner léger sur du sable voluptueux dans les rires des enfants et le jour bien vivant à 10 heures 30 le soir.<br /> <br /> Et là, je n'ai pas de "pensée satanique" (Dieu m'en préserve) ; je me dis simplement qu'un été aussi beau, l'océan, la campagne et les corps relâchés suffisent à mon bonheur. <br /> <br /> Quant au "Quid", c'est une noble ambition parfaitement parisienne.
Propos insignifiants
  • Promenade buissonnière parmi les livres et les écrivains, avec parfois quelques détours. Pas d'exhaustivité, pas d'ordre, pas de régularité, une sorte de collage aussi. Les mots ne sont les miens, je les collectionne.
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