Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Propos insignifiants
Newsletter
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 196 537
14 mai 2006

La bougie Morand

(...) Le livre de ce Jardin-là (filleul de Morand) est précieux. On pénètre dans l'intimité du vieil homme qui toujours échappa. Il était un paradoxe vivant : sauvage et civilisé à la fois. Sauvage par son côté électrique, civilisé par ses incessantes mondanités. Le monde, selon lui, est une prison dont il faut s'évader par les femmes, l'art, les voyages. Rien que la terre. Morand est un Kodak. De son oeil de caïman, il capte puis gobe. Jardin - qui se réveillait parfois à 5 heures du matin pour satisfaire le maître impatient - en sait quelque chose : toujours prêt à bondir avant l'aube pour partir en Bretagne, en Ecosse, en Suisse. Morand a ses habitudes : sa gymnastique et sa sieste, qu'il peut faire sur la banquette arrière de son Alfa Romeo. Il a ce côté nietzschéen, "grand style", cette force qui évite les remords. Il n'aime pas les enfants mais agit comme eux : il part sans dire bonsoir, ne tient pas en place. Il est plus dans le classicisme que dans le romantisme. Ne s'épanche pas. Il n'a rien d'un souffreteux pâlichon ; il se meut dans une élégance sportive. Pour lui, le salut est sur la terre. C'est pour cela qu'il en profite, tout égoïste de son plaisir et de ses émerveillements. Il veut tout voir, profiter à mort de la vie. Amor fati. Il entretient son corps pour tenir le plus longtemps possible sur cette terre qui se dérobe quand Hélène n'y est plus. Gabriel Jardin nous raconte un Morand serein et agité, qui ronfle dans une auberge bretonne, qui trouve qu'Adjani ressemble dans Adèle H à une dactylo épleurée. Voilà trente ans que la bougie Morand s'est éteinte. Ce témoignage la ranime. Et on y voit un peu plus clair.

Anthony Palou, le Figaro Magazine, 13 mai 2006.

Le début de l'article et d'autres textes :

http://propos-insignifiants.forumactif.com/index.forum

Commentaires
Propos insignifiants
  • Promenade buissonnière parmi les livres et les écrivains, avec parfois quelques détours. Pas d'exhaustivité, pas d'ordre, pas de régularité, une sorte de collage aussi. Les mots ne sont les miens, je les collectionne.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog