je me suis assis devant ma machine à écrire et le roman a jailli
Son sourire, esquissé du bout des lèvres, lui donne l'air d'un gamin prêt à jouer un bon tour. Don DeLillo est là, au 24e étage d'un gratte-ciel de l'Upper East Side, chez son agent littéraire. Insaisissable, DeLillo. Il confesse détester parler de lui et ne pas aimer évoquer ses livres; il pense qu'un roman n'est pas une thèse et que son auteur est le moins bien placé pour tenter la moindre interprétation. Et pourtant il vient d'accepter de sortir de la réserve qu'il s'est imposée depuis des années. Peut-être parce que ce nouveau roman, L'Homme qui tombe, est l'un de ceux qui lui tiennent le plus à coeur: «Le 11 septembre est, pour un écrivain new-yorkais, un sujet impossible à évacuer. Il faut, tôt ou tard, accepter de s'y confronter», reconnaît-il d'emblée.
Tout a commencé le jour de la réélection de George W. Bush, en novembre 2004. «Je n'avais absolument aucune intention de me lancer dans une fiction sur le 11 septembre. Mais, ce jour-là, je me suis assis devant ma machine à écrire et le roman a jailli...», explique-t-il. De là à confondre ce livre avec un brûlot, il n'y a qu'un pas, que Don DeLillo aimerait bien qu'on ne franchisse pas: «La politique ne m'intéresse pas. C'est sans doute difficile à comprendre pour qui lit mes romans, mais ce qui me fascine, c'est les répercussions de la politique dans la vie intime des gens. Rien d'autre.»
L'Express, 3 avril 2008.